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Tribune : Liquidation judiciaire de FrancEole ou le récit d'un échec industriel, social et environnemental

L’information est passée totalement inaperçue à l’échelle nationale et pourtant, c’est à la veille de l’adoption en première lecture par l’Assemblée Nationale du projet de loi « énergie et climat »[1] que le Tribunal de Commerce de Châlon-sur-Saône (71) a scellé le sort des 61 salariés de l’entreprise FrancEole en prononçant, jeudi 27 juin dernier, la liquidation judiciaire du seul constructeur de mâts d’éoliennes en acier de France, situé à Longvic (Côte d’Or, 21).

Epilogue d’un long combat des salariés pour la sauvegarde de leur emploi, la fermeture définitive de l’entreprise FrancEole témoigne de la schizophrénie des pouvoirs publics en matière environnementale, incapables d’établir une véritable stratégie industrielle dans le domaine des énergies renouvelables, et de protéger l’emploi dans certaines zones déjà fragilisées de province.

Récit d’un échec industriel, social, et environnemental.

 

Créée en 2007, la société de construction de mâts d’éoliennes s’est installée dans un contexte européen et international concurrentiel : en Espagne, au Portugal, en Allemagne, jusqu’en Chine… pays dans lesquels les coûts de production sont souvent réduits et le terreau industriel déjà propice au développement de l’activité. Elle a donc dû s’adapter et pour se faire une place, s’imposer comme sous-traitant de plus gros constructeurs éoliens.

Seule face aux « géants », la société a longtemps fonctionné sur la base d’un contrat d’exclusivité avec le puissant danois Vestas : une situation des plus dangereuses.

Bénéficiant du savoir-faire de ses équipes, mais souffrant d’un manque cruel d’investissement – y compris dans la recherche et le développement[2] –, accusant par ailleurs le prix de la concurrence étrangère, l’entreprise est confrontée à une première situation de redressement judiciaire en 2012, qui inquiète son principal client et réduit sensiblement le nombre de commandes.

Rachetée entre temps par le groupe GORGE / PELICAN et fusionnée avec son concurrent allemand de l’époque, SIAG, situé au Creusot (71), FrancEole continue pourtant d’y croire. Mais au fil des années, insuffisamment compétitive, elle tend parfois à facturer à perte pour décrocher des marchés : les dettes s’accumulent, le site du Creusot en particulier perd de la vitesse, et en mai 2017, FrancEole doit de nouveau être placée en redressement judiciaire. La SAS MATIERE se déclare preneuse pour la seule entité économique du Creusot, laissant au passage quelques 55 salariés sur le carreau. A l’issue de la période laissée par le Tribunal de Commerce pour la présentation des offres de rachat, et sollicitée directement par la Commissaire au Redressement Productif de l’époque, la société NIMBUS INVESTMENTS CXV B.V (elle-même entité du fonds d’investissement néerlandais NIMBUS) se déclare quant à elle repreneuse[3] pour le site de Longvic. Le groupe NIMBUS détient déjà à l’époque des participations dans différentes entreprises industrielles : 31 en Europe de l’Ouest, dont certaines situées en France. L’offre de cession présentée par NIMBUS contient ainsi 50 000 euros de rachat de fonds de commerce, 125 000 euros pour la reprise du stock, et le maintien des 55 salariés de Longvic à leur poste. Alors même qu’elle ne fait état d’aucun plan d’investissement sur le long terme, de financement de la recherche et du développement, d’éventuelle stratégie d’entreprise, l’administrateur judiciaire et le Tribunal de Commerce concluent pourtant en septembre 2017 que l’offre ainsi soumise permettrait d’ « assurer, dans des conditions satisfaisantes, le maintien de l’activité de l’unité économique autonome » de Longvic, avalisant ainsi la proposition faite par le groupe néerlandais[4]. Pendant plusieurs mois, NIMBUS bénéficie alors d’un carnet de commandes déjà pré-établi avec les constructeurs Senvion et Vestas[5]. Mais à l’été 2018, les problèmes techniques s’enchaînent sur un chantier Vestas ; Senvion de son côté se trouve en difficulté en Allemagne et doit à son tour être placée en redressement judiciaire, laissant derrière elle une créance d’environ 1 million d’euros pour des sections déjà construites par FrancEole et non rémunérées.

Alors, début 2019, le site de Longvic doit de nouveau être placé dans une troisième et dernière procédure de redressement judiciaire[6]. Faute de ne pouvoir financer ses besoins en fonds de roulement, il se trouve à cette époque incapable d’honorer une commande de 13 mâts, et les salariés sont placés en chômage technique début mai 2019.

 

De l’avis de l’ensemble des salariés et du personnel encadrant – confirmé par Monsieur Osman Benyahia, délégué du personnel depuis 8 ans au sein de l’entreprise –, sur toute la période de reprise de FrancEole par NIMBUS, cette dernière n’a réalisé aucun investissement, dans le matériel, la recherche, le développement, l’obtention de nouveaux contrats, ni aucune stratégie de diversification, laissant ainsi les difficultés financières, en trésorerie, s’accumuler pendant deux ans jusqu’à l’issue du Tribunal le 27 juin dernier et le constat unanime que « l’entreprise n’est plus viable s’agissant de son niveau d’activité, de l’insuffisance de trésorerie et de l’absence de perspective favorable au redressement ».[7]

 

La liquidation judiciaire de FranceEole est ainsi prononcée la veille de l’adoption en première lecture, par l’Assemblée Nationale, du projet de loi « énergie et climat ». Et elle soulève avec elle de nombreuses interrogations.

S’agissant déjà de l’offre de cession présentée par Nimbus et acceptée par le Tribunal en 2017. Celle-ci frappe par son inconsistance. A l’époque, la société néerlandaise aura racheté le site FrancEole de Longvic pour quelques 175 000 euros : en somme, une bouchée de pain compte tenu du carnet de commandes déjà pré-établi. Les textes en la matière sont pourtant clairs : l’offre du candidat à la reprise d’une entreprise en redressement judiciaire doit notamment comporter (article L.621-85 du Code de Commerce) des prévisions d’activité avec un compte de résultat prévisionnel, des prévisions de financement formulées sous forme de plan pour que le Tribunal soit en mesure de retenir l’offre qui permet dans les meilleures conditions, non seulement d’assurer le paiement des créanciers, mais aussi d’assurer le plus durablement l’emploi et la viabilité du projet. Rien de tout cela n’y figure, et l’on comprend que depuis l’origine, aucune stratégie n’a été établie par Nimbus pour FrancEole et son personnel sur le long terme.

En réalité, la société néerlandaise semble avoir laissé la société mourir en silence. Aucun dialogue direct avec l’un de ses représentants et l’équipe de FrancEole n’a d’ailleurs jamais réellement été établi. La situation rappelle à la mémoire des précédentes participations du fonds NIMBUS en France : dans la célèbre Chocolaterie de Bourgogne, actionnaire principal en 2015, il s’était désengagé dès 2016 ; dans le fabricant de céréales alsacien Sevenday qu’il avait racheté en 2015, jusqu’à multiplier les signes de désengagement (démissions des dirigeants locaux, non-renouvellement des stocks de matière première, absence d’investissements…) pour déboucher à la liquidation judiciaire en mars 2019 dernier.

Pour FrancEole, et bien que la réalisation de l’actif n’ait pas encore été prononcée[8], comment ne pas croire que le groupe néerlandais ait en réalité cherché à spéculer sur les plus-values à obtenir dans l’hypothèse d’une liquidation judiciaire ?

 

Ce constat nous renvoie nécessairement à l’inaction et au désintérêt manifeste des pouvoirs publics pourtant saisis à plusieurs reprises de la situation : la députée République En Marche de la circonscription, le Commissaire aux Restructurations et à la Prévention des Difficultés des entreprises (CRP), la Direction Régionale des Entreprises (Direccte), même la Secrétaire d’Etat auprès du Ministre de l’Economie et des Finances Delphine Gény-Stephann pourtant passée visiter le site en 2018, tous sont restés impuissants, sourds et inactifs face aux appels des 61 salariés qui refuseront jusqu’au bout de faire grève sur leur temps de travail pour ne pas envenimer davantage la situation du site.

De l’avis de tous, seul le Maire de la commune concernée, Longvic, s’est investi jusqu’à la dernière issue, à la recherche constante de solutions pour la reprise du site et le maintien de l’emploi : échelon municipal, dernier bastion d’action face aux carences des pouvoirs publics ?

Comment comprendre qu’à la veille de l’examen et du vote du projet de loi « énergie et climat », qu’en pleine urgence climatique, la situation industrielle du site FrancEole n’ait pas davantage interpellé les autorités ? Rappelons tout de même que, – et malgré l’absence révélatrice d’un volet industriel parmi les quatre axes principaux du projet  – la loi ambitionne normalement la réduction de notre dépendance aux énergies fossiles, le développement des énergies renouvelables dans le parc énergétique[9]. Comment y parvenir en l’absence totale de politique industrielle, de volet lié à l’emploi et aux opportunités que peuvent constituer le développement durable et les énergies renouvelables, y compris à l’échelon local ? Ce sont des centaines de milliers d’emplois qui pourraient être créés (conclusion à laquelle parvient l’Agence de l’Environnement et de la Maîtrise de l’Energie elle-même), mais rien n’est fait pour sauvegarder les quelques dizaines d’entre eux qui auraient pu contribuer à l’émergence d’un marché industriel français de la construction d’éoliennes. L’on apprend même bientôt que les mêmes mâts en acier, autrefois fabriqués par FrancEole, seront désormais importés depuis la Chine vers la France….

De toute évidence, la longue agonie, puis la liquidation du site de Longvic, sonnent l’échec des politiques publiques actuelles en matière industrielle, sociale, et environnementale.

 LAURA PETIOT

TOUS DROITS RESERVES


[1] Adopté le 28 juin par un hémicycle désespérément vide, le texte du projet de loi sera examiné par le Sénat à partir du 16 juillet.

[2] Les salariés notent par exemple avec regret l’absence de bureau d’étude.

[3] Offre de cession déposée au greffe du Tribunal de Commerce de Châlon le 27 août 2017.

[4] Voir jugement du Tribunal de Commerce de Châlon sur Saône en date du 29 septembre 2017.

[5] La société reçût à cette époque l’encaissement d’une facture pour une commande d’un montant de 1,8 millions d’euros.

[6] Procédure ouverte le 1er février 2019.

[7] Jugement du Tribunal de Commerce de Châlon-sur-Saône en date du 27 juin 2919.

[8] La réalisation est l’opération de vente des éléments d’actif du débiteur. Il s’agit de l’opération essentielle de la procédure de liquidation judiciaire, grâce à laquelle la finalité de la liquidation judiciaire va pouvoir être accomplie, à savoir : payer les créanciers grâce au prix de la vente.

[9] La loi prévoit notamment de réduire la dépendance aux énergies fossiles de 40% d’ici 2030 et d’atteindre 32% d’énergies renouvelables d’ici 2030L’information est passée totalement inaperçue à l’échelle nationale et pourtant, c’est à la veille de l’adoption en première lecture par l’Assemblée Nationale du projet de loi « énergie et climat »[1] que le Tribunal de Commerce de Châlon-sur-Saône (71) a scellé le sort des 61 salariés de l’entreprise FrancEole en prononçant, jeudi 27 juin dernier, la liquidation judiciaire du seul constructeur de mâts d’éoliennes en acier de France, situé à Longvic (Côte d’Or, 21).

Epilogue d’un long combat des salariés pour la sauvegarde de leur emploi, la fermeture définitive de l’entreprise FrancEole témoigne de la schizophrénie des pouvoirs publics en matière environnementale, incapables d’établir une véritable stratégie industrielle dans le domaine des énergies renouvelables, et de protéger l’emploi dans certaines zones déjà fragilisées de province.

Récit d’un échec industriel, social, et environnemental.

 

Créée en 2007, la société de construction de mâts d’éoliennes s’est installée dans un contexte européen et international concurrentiel : en Espagne, au Portugal, en Allemagne, jusqu’en Chine… pays dans lesquels les coûts de production sont souvent réduits et le terreau industriel déjà propice au développement de l’activité. Elle a donc dû s’adapter et pour se faire une place, s’imposer comme sous-traitant de plus gros constructeurs éoliens.

Seule face aux « géants », la société a longtemps fonctionné sur la base d’un contrat d’exclusivité avec le puissant danois Vestas : une situation des plus dangereuses.

Bénéficiant du savoir-faire de ses équipes, mais souffrant d’un manque cruel d’investissement – y compris dans la recherche et le développement[2] –, accusant par ailleurs le prix de la concurrence étrangère, l’entreprise est confrontée à une première situation de redressement judiciaire en 2012, qui inquiète son principal client et réduit sensiblement le nombre de commandes.

Rachetée entre temps par le groupe GORGE / PELICAN et fusionnée avec son concurrent allemand de l’époque, SIAG, situé au Creusot (71), FrancEole continue pourtant d’y croire. Mais au fil des années, insuffisamment compétitive, elle tend parfois à facturer à perte pour décrocher des marchés : les dettes s’accumulent, le site du Creusot en particulier perd de la vitesse, et en mai 2017, FrancEole doit de nouveau être placée en redressement judiciaire. La SAS MATIERE se déclare preneuse pour la seule entité économique du Creusot, laissant au passage quelques 55 salariés sur le carreau. A l’issue de la période laissée par le Tribunal de Commerce pour la présentation des offres de rachat, et sollicitée directement par la Commissaire au Redressement Productif de l’époque, la société NIMBUS INVESTMENTS CXV B.V (elle-même entité du fonds d’investissement néerlandais NIMBUS) se déclare quant à elle repreneuse[3] pour le site de Longvic. Le groupe NIMBUS détient déjà à l’époque des participations dans différentes entreprises industrielles : 31 en Europe de l’Ouest, dont certaines situées en France. L’offre de cession présentée par NIMBUS contient ainsi 50 000 euros de rachat de fonds de commerce, 125 000 euros pour la reprise du stock, et le maintien des 55 salariés de Longvic à leur poste. Alors même qu’elle ne fait état d’aucun plan d’investissement sur le long terme, de financement de la recherche et du développement, d’éventuelle stratégie d’entreprise, l’administrateur judiciaire et le Tribunal de Commerce concluent pourtant en septembre 2017 que l’offre ainsi soumise permettrait d’ « assurer, dans des conditions satisfaisantes, le maintien de l’activité de l’unité économique autonome » de Longvic, avalisant ainsi la proposition faite par le groupe néerlandais[4]. Pendant plusieurs mois, NIMBUS bénéficie alors d’un carnet de commandes déjà pré-établi avec les constructeurs Senvion et Vestas[5]. Mais à l’été 2018, les problèmes techniques s’enchaînent sur un chantier Vestas ; Senvion de son côté se trouve en difficulté en Allemagne et doit à son tour être placée en redressement judiciaire, laissant derrière elle une créance d’environ 1 million d’euros pour des sections déjà construites par FrancEole et non rémunérées.

Alors, début 2019, le site de Longvic doit de nouveau être placé dans une troisième et dernière procédure de redressement judiciaire[6]. Faute de ne pouvoir financer ses besoins en fonds de roulement, il se trouve à cette époque incapable d’honorer une commande de 13 mâts, et les salariés sont placés en chômage technique début mai 2019.

 

De l’avis de l’ensemble des salariés et du personnel encadrant – confirmé par Monsieur Osman Benyahia, délégué du personnel depuis 8 ans au sein de l’entreprise –, sur toute la période de reprise de FrancEole par NIMBUS, cette dernière n’a réalisé aucun investissement, dans le matériel, la recherche, le développement, l’obtention de nouveaux contrats, ni aucune stratégie de diversification, laissant ainsi les difficultés financières, en trésorerie, s’accumuler pendant deux ans jusqu’à l’issue du Tribunal le 27 juin dernier et le constat unanime que « l’entreprise n’est plus viable s’agissant de son niveau d’activité, de l’insuffisance de trésorerie et de l’absence de perspective favorable au redressement ».[7]

 

La liquidation judiciaire de FranceEole est ainsi prononcée la veille de l’adoption en première lecture, par l’Assemblée Nationale, du projet de loi « énergie et climat ». Et elle soulève avec elle de nombreuses interrogations.

S’agissant déjà de l’offre de cession présentée par Nimbus et acceptée par le Tribunal en 2017. Celle-ci frappe par son inconsistance. A l’époque, la société néerlandaise aura racheté le site FrancEole de Longvic pour quelques 175 000 euros : en somme, une bouchée de pain compte tenu du carnet de commandes déjà pré-établi. Les textes en la matière sont pourtant clairs : l’offre du candidat à la reprise d’une entreprise en redressement judiciaire doit notamment comporter (article L.621-85 du Code de Commerce) des prévisions d’activité avec un compte de résultat prévisionnel, des prévisions de financement formulées sous forme de plan pour que le Tribunal soit en mesure de retenir l’offre qui permet dans les meilleures conditions, non seulement d’assurer le paiement des créanciers, mais aussi d’assurer le plus durablement l’emploi et la viabilité du projet. Rien de tout cela n’y figure, et l’on comprend que depuis l’origine, aucune stratégie n’a été établie par Nimbus pour FrancEole et son personnel sur le long terme.

En réalité, la société néerlandaise semble avoir laissé la société mourir en silence. Aucun dialogue direct avec l’un de ses représentants et l’équipe de FrancEole n’a d’ailleurs jamais réellement été établi. La situation rappelle à la mémoire des précédentes participations du fonds NIMBUS en France : dans la célèbre Chocolaterie de Bourgogne, actionnaire principal en 2015, il s’était désengagé dès 2016 ; dans le fabricant de céréales alsacien Sevenday qu’il avait racheté en 2015, jusqu’à multiplier les signes de désengagement (démissions des dirigeants locaux, non-renouvellement des stocks de matière première, absence d’investissements…) pour déboucher à la liquidation judiciaire en mars 2019 dernier.

Pour FrancEole, et bien que la réalisation de l’actif n’ait pas encore été prononcée[8], comment ne pas croire que le groupe néerlandais ait en réalité cherché à spéculer sur les plus-values à obtenir dans l’hypothèse d’une liquidation judiciaire ?

 

Ce constat nous renvoie nécessairement à l’inaction et au désintérêt manifeste des pouvoirs publics pourtant saisis à plusieurs reprises de la situation : la députée République En Marche de la circonscription, le Commissaire aux Restructurations et à la Prévention des Difficultés des entreprises (CRP), la Direction Régionale des Entreprises (Direccte), même la Secrétaire d’Etat auprès du Ministre de l’Economie et des Finances Delphine Gény-Stephann pourtant passée visiter le site en 2018, tous sont restés impuissants, sourds et inactifs face aux appels des 61 salariés qui refuseront jusqu’au bout de faire grève sur leur temps de travail pour ne pas envenimer davantage la situation du site.

De l’avis de tous, seul le Maire de la commune concernée, Longvic, s’est investi jusqu’à la dernière issue, à la recherche constante de solutions pour la reprise du site et le maintien de l’emploi : échelon municipal, dernier bastion d’action face aux carences des pouvoirs publics ?

Comment comprendre qu’à la veille de l’examen et du vote du projet de loi « énergie et climat », qu’en pleine urgence climatique, la situation industrielle du site FrancEole n’ait pas davantage interpellé les autorités ? Rappelons tout de même que, – et malgré l’absence révélatrice d’un volet industriel parmi les quatre axes principaux du projet  – la loi ambitionne normalement la réduction de notre dépendance aux énergies fossiles, le développement des énergies renouvelables dans le parc énergétique[9]. Comment y parvenir en l’absence totale de politique industrielle, de volet lié à l’emploi et aux opportunités que peuvent constituer le développement durable et les énergies renouvelables, y compris à l’échelon local ? Ce sont des centaines de milliers d’emplois qui pourraient être créés (conclusion à laquelle parvient l’Agence de l’Environnement et de la Maîtrise de l’Energie elle-même), mais rien n’est fait pour sauvegarder les quelques dizaines d’entre eux qui auraient pu contribuer à l’émergence d’un marché industriel français de la construction d’éoliennes. L’on apprend même bientôt que les mêmes mâts en acier, autrefois fabriqués par FrancEole, seront désormais importés depuis la Chine vers la France….

De toute évidence, la longue agonie, puis la liquidation du site de Longvic, sonnent l’échec cuisant des politiques publiques actuelles en matière industrielle, sociale, et environnementale.

 

© Tous droits réservés

Laura Petiot

Juriste et fondatrice du cabinet L.P-Consulting


[1] Adopté le 28 juin par un hémicycle désespérément vide, le texte du projet de loi sera examiné par le Sénat à partir du 16 juillet.

[2] Les salariés notent par exemple avec regret l’absence de bureau d’étude.

[3] Offre de cession déposée au greffe du Tribunal de Commerce de Châlon le 27 août 2017.

[4] Voir jugement du Tribunal de Commerce de Châlon sur Saône en date du 29 septembre 2017.

[5] La société reçût à cette époque l’encaissement d’une facture pour une commande d’un montant de 1,8 millions d’euros.

[6] Procédure ouverte le 1er février 2019.

[7] Jugement du Tribunal de Commerce de Châlon-sur-Saône en date du 27 juin 2919.

[8] La réalisation est l’opération de vente des éléments d’actif du débiteur. Il s’agit de l’opération essentielle de la procédure de liquidation judiciaire, grâce à laquelle la finalité de la liquidation judiciaire va pouvoir être accomplie, à savoir : payer les créanciers grâce au prix de la vente.

[9] La loi prévoit notamment de réduire la dépendance aux énergies fossiles de 40% d’ici 2030 et d’atteindre 32% d’énergies renouvelables d’ici 2030